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teur qui se répandait avec une violence irrésistible depuis les frontières de la Gaule jusqu’à la mer d’Afrique. Un des plus éloquens historiens de l’Espagne a décrit les malheurs de sa patrie dans un discours concis, où il a rassemblé les déclamations violentes et peut-être exagérées des auteurs contemporains[1]. « L’irruption de ces peuples fut suivie des plus affreuses calamités. Les Barbares pillaient et massacraient indifféremment les Romains et les Espagnols, et ravageaient avec la même fureur les villes et les campagnes. La famine réduisit les malheureux habitans à se nourrir de chair humaine ; et les animaux sauvages qui se multipliaient sans obstacle, rendus plus furieux par l’habitude du sang et les aiguillons de la faim, attaquaient sans crainte les hommes pour les dévorer. La peste, suite inévitable de la famine, vint bientôt combler la désolation ; la plus grande partie des peuples en fut la victime, et les gémissemens des mourans n’excitaient que l’envie de ceux qui leur survivaient. Enfin les Barbares, rassasiés de meurtre et de brigandage, et atteints eux-mêmes de la maladie contagieuse dont ils étaient les funestes auteurs, se fixèrent dans le pays qu’ils avaient dépeuplé. Les Suèves et les Vandales se partagèrent l’ancienne Galice, où se trouvait enclavé le royaume de la

  1. Idatius voudrait appliquer les prophéties de Daniel aux calamités de sa nation, et il est par conséquent obligé d’arranger les événemens d’une manière conforme aux termes de la prédiction.