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Retraite hardie d’Alaric.

Claudien[1] a prodigué son éloquente admiration à la victoire de Pollentia, qu’il célèbre comme le jour le plus glorieux de la vie de son patron ; mais sa muse partiale accorde à regret des éloges moins commandés au caractère d’Alaric. Quoiqu’il charge son nom des injurieuses épithètes de pirate et de brigand, auxquelles purent si bien prétendre les conquérans de tous les siècles, le chantre de Stilichon est forcé d’avouer qu’Alaric possédait cette invincible force d’âme qui, toujours supérieure à la fortune, tire de nouvelles ressources du sein de l’adversité. Après la défaite totale de son infanterie, il s’échappa, ou plutôt se retira du champ de bataille avec la plus grande partie de sa cavalerie encore en bon ordre et peu endommagée. Sans perdre le temps à déplorer la perte irréparable de tant de braves compagnons, il laissa aux ennemis victorieux la liberté d’enchaîner les images captives d’un roi des Goths[2], et résolut de traverser les passages

    l’une de l’autre, et la distance est encore plus grande si les Cimbres furent vaincus dans la vaste et stérile plaine de Vérone. (Maffei, Verona illustrata, part. I, p. 54-62.)

  1. Il est indispensable de suivre Claudien et Prudence avec circonspection, pour réduire l’exagération et extraire de ces poètes le sens historique.
  2. Et gravant en airain ses frêles avantages.
    De mes états conquis enchaîner les images.

    Cet usage d’exposer en triomphe les images des rois et des provinces, était très-familier aux Romains. Le buste de Mithridate, haut de douze pieds, était d’or massif. (Freinshem, Supplément de Tite-Live, CIII, 47.)