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mèrent aussitôt le nom de leur souverain légitime. Les Barbares, surpris de la défection des troupes romaines, prirent la fuite en désordre, et se dispersèrent selon leur coutume. Mascezel obtint une victoire facile, complète, et presque sans effusion de sang[1]. L’usurpateur s’échappa du champ de bataille, gagna le bord de la mer, et se jeta dans un petit vaisseau, espérant atteindre en sûreté un port allié de l’empire d’Orient ; mais l’opiniâtreté du vent contraire le repoussa dans le port de la ville de Tabraca[2], qui s’était soumise, avec le reste de la province, à la domination d’Honorius et à l’autorité de son lieutenant. Les habitans, pour prouver leur repentir et leur fidélité, saisirent Gildon et le jetèrent dans un donjon ; mais son désespoir lui sauva le tourment insupportable d’être conduit en la présence d’un frère victorieux et mortellement offensé[3]. Les esclaves et les dépouilles furent déposés aux pieds de l’empereur. Stilichon, dont la modération ne se faisait jamais mieux admirer que dans la pro-

  1. Zosime (V, p. 303) suppose un combat opiniâtre ; mais le récit d’Orose paraît contenir un fait réel, déguisé sous l’apparence d’un miracle.
  2. Tabraca était située entre les deux Hippone. (Cellarius, t. II, part. II, p. 112 ; d’Anville, t. III, p. 84.) Orose a nommé clairement le champ de bataille ; mais notre ignorance ne nous permet pas d’en fixer la situation précise.
  3. La mort de Gildon est rapportée par Claudien (I cons. Stilich., V, 357), et par Zosime et Orose, ses meilleurs interprètes.