Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/411

Cette page a été validée par deux contributeurs.

soldats de la paye ou des gratifications qu’ils méritaient ou prétendaient pouvoir réclamer de la libéralité du gouvernement[1]. La valeur et l’habileté dont il donna depuis des preuves dans la défense de l’Italie contre les armées d’Alaric et de Radagaise peuvent paraître confirmer ce que la renommée avait déjà publié de son mérite ; et dans un siècle moins scrupuleux que le nôtre sur les lois de l’honneur ou celles de l’orgueil, les généraux romains purent céder la prééminence du rang à la supériorité reconnue du génie[2]. Stilichon déplora et vengea la mort de Promotus, son rival et son ami ; le massacre de plusieurs milliers de Bastarnes est représenté par le poète comme un sacrifice sanglant que l’Achille romain offrait aux mânes d’un second Patrocle. Les vertus et les victoires de Stilichon éveillèrent la jalousie et la haine de Rufin ; les artifices de la calomnie auraient peut-être prévalu, si la tendre et vigi-

  1. Les beaux vers de Claudien (in I cons. Stilich., II, 113) sont une preuve du génie de l’auteur ; mais l’intégrité invariable de Stilichon dans l’administration militaire, est bien mieux constatée par le témoignage que Zosime semble donner malgré lui. Voyez l. V, p. 345.
  2. … Si bellica moles
    Ingrueret, quamvis annis et jure minori,
    Cedere grandævos equitum peditumque magistros
    Adspiceres…

        Claudien, Laus Seren., p. 196, etc.

    Un général moderne regarderait leur soumission, ou comme un héroïsme patriotique, ou comme une bassesse méprisable.