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tion de ses facultés. La théologie simple et sublime des premiers chrétiens se corrompit insensiblement, et la monarchie du ciel, déjà surchargée de subtilités métaphysiques, fut totalement défigurée par l’introduction d’une mythologie populaire qui tendait à rétablir le règne du polythéisme[1].

Introduction des cérémonies païennes.

IV. Comme les objets de la dévotion se rapprochaient insensiblement de la faiblesse de l’imagination, on introduisit des rites et des cérémonies capables de frapper les sens du vulgaire. Si, au commencement du cinquième siècle[2], Tertullien ou Lactance[3] fussent sortis du sein des morts pour assister à la fête d’un saint ou d’un martyr[4], ils auraient

  1. M. Hume (Essais, vol. II, p. 434) observe en philosophe le flux et le reflux du théisme et du polythéisme.
  2. D’Aubigné (voyez ses Mémoires, p. 156-160) offrit de bonne foi, avec le consentement des ministres protestans, de prendre pour règle de foi celle des quatre premiers siècles du christianisme. Le cardinal du Perron marchanda pour qu’on y ajoutât quarante ans, qui lui furent imprudemment accordés ; cependant aucun des deux partis n’aurait trouvé son compte dans ce marché extravagant.
  3. Le culte pratiqué et prêché par Tertullien, Lactance, Arnobe, etc., est si exclusivement pur et spirituel, que leurs déclamations contre les païens rejaillissent quelque-fois jusque sur les cérémonies judaïques.
  4. Faustus le manichéen accuse les catholiques d’idolâtrie : Vertitis idola in martyres… quos votis similibus colitis. M. de Beausobre (Histoire critique du Manich., t. II, p. 629-700), protestant, mais philosophe, a représenté, avec au-