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core, sentait la difficulté et le danger de son entreprise. Il évite avec soin toutes les réflexions qui auraient pu offenser la religion de son souverain ; il déclare humblement que les prières et les instances sont ses seules armes, et argumente avec adresse moins en philosophe qu’en rhéteur. Symmaque tâche de séduire l’imagination du jeune monarque par l’étalage pompeux des attributs de la victoire. Il insinue que la confiscation des revenus consacrés au service des autels est indigne de son caractère noble et généreux, et soutient que les sacrifices des Romains perdraient leur force et leur influence s’ils ne se célébraient plus aux dépens et au nom de la république. L’orateur se sert même du scepticisme pour excuser la superstition. Le mystère incompréhensible de l’univers élude, dit-il, la curiosité des faibles humains, et on peut déférer à l’empire de l’habitude dans les occasions où la raison n’est d’aucun secours. L’attachement de toutes les nations pour les opinions consacrées par une longue suite de siècles, paraît dicté par les règles de la prudence. Si ces siècles ont été couronnés de gloire et de prospérité, si la dévotion des peuples a obtenu des dieux les faveurs qu’ils sollicitaient sur leurs autels, tout engage à persister dans des pratiques salutaires et à éviter les dangers inconnus que pourraient attirer d’imprudentes innovations. Les preuves tirées de l’ancienneté et du succès étaient singulièrement en faveur de la religion de Numa ; en introduisant sur la scène Rome elle-même ou le génie céleste qui présidait à sa con-