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raient en foule sous les drapeaux d’un rebelle ; les pauvres étaient attirés par l’espoir d’un pillage général dont la crainte soumettait les riches, et l’incorrigible crédulité de la multitude se laissait encore abuser par la promesse des avantages qu’elle devait retirer d’une révolution. On saisit les magistrats, on enfonça les prisons et les arsenaux, on s’empara du port et des portes de la ville, et dans peu d’heures Procope se trouva, du moins pour le moment, maître absolu dans la capitale de l’empire. Il profita avec assez d’adresse et de courage d’un succès qu’il avait si peu espéré. Il fit répandre les bruits les plus favorables à ses intérêts, et tandis qu’il trompait la populace par de fréquentes audiences données aux ambassadeurs imaginaires des nations les plus éloignées, les corps d’armée postés dans les villes de la Thrace et dans les forteresses du Bas-Danube, se laissaient insensiblement entraîner dans la révolte. Les princes des Goths fournirent au souverain de Constantinople le secours formidable de plusieurs milliers d’auxiliaires. Ses généraux passèrent le Bosphore, et soumirent, sans effort, les provinces riches et désarmées de l’Asie et de la Bithynie. Après une défense honorable, la ville et l’île de Cyzique se rendirent à ses armes. Les légions renommées des Joviens et des Herculiens embrassèrent la cause de l’usurpateur, qu’elles devaient anéantir ; et comme les vétérans étaient sans cesse recrutés par des levées nouvelles, Procope parut bientôt à la tête d’une armée dont la force et la valeur n’étaient point au--