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revêtu de la pourpre à Carrhes dans le temple de la Lune[1]. Il tâcha de désarmer les soupçons de Jovien par une conduite soumise et respectueuse, et après avoir quitté, sans résistance, son commandement militaire, il alla, suivi de sa mère et de sa famille, cultiver l’ample patrimoine qu’il possédait dans la province de Cappadoce. L’apparition d’un officier et d’une troupe de soldats vint le troubler cruellement dans ses innocentes occupations. Ils étaient chargés par Valens et Valentinien d’arracher l’infortuné Procope des bras de ses parens, et de le conduire soit à une prison perpétuelle, soit à une mort ignominieuse. Sa présence d’esprit lui procura quelque délai et une mort plus éclatante. Sans faire la moindre résistance à l’ordre des empereurs, il demanda quelques momens pour embrasser sa famille en larmes ; et tandis qu’il endormait la vigilance de ses gardes par un repas splendide, il eut l’adresse de gagner la côte de la mer Noire, d’où il passa dans la province du Bosphore. Procope resta plusieurs mois caché dans cette triste région, exposé à tous les maux de l’exil, de la solitude et du besoin, aigrissant ses peines par les réflexions d’un caractère naturellement mélancolique, et sans cesse agité de la crainte, trop bien fondée, que les Barba-

  1. Ammien, XXIII, 3 ; XXVI, 6. Il raconte ce fait en hésitant : Susurravit obscurior fama ; nemo enim dicti auctor exstitit verus. C’est au moins une preuve que Procope était païen. Cependant sa religion ne semble avoir eu aucune influence ou favorable ou contraire à ses prétentions.