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avait entendu un chef des Goths dire avec une insultante modération, que pour lui, il était las de carnage, mais qu’il ne pouvait pas concevoir comment des hommes qui fuyaient devant lui comme un troupeau de moutons, prétendaient encore disputer la possession de leurs trésors et de leurs provinces[1]. Les Romains tremblaient au nom des Goths, comme les Goths avaient tremblé au nom des Huns[2]. Si Théodose, rassemblant précipitamment ses forces dispersées, les eût conduites contre un ennemi victorieux, les frayeurs de son armée auraient suffi pour la dissiper, et son imprudence n’aurait pas été justifiée par une seule chance de succès ; mais dans une circonstance si dangereuse, Théodose le Grand mérita cette honorable épithète, et se montra le gardien soigneux et fidèle de ses états chancelans. Il prit ses quartiers à Thessalonique, capitale du diocèse de la Macédoine[3], d’où il veillait sur les mouvemens des Barbares, et dirigeait les opérations de ses lieutenans depuis les murs de Constantinople jusqu’aux rives de la mer Adriatique. Les forti-

  1. Saint Chrysostome, t. I, p. 344, éd. Montfaucon. J’ai examiné et vérifié ce passage ; mais, sans le secours de Tillemont, je n’aurais jamais découvert une anedocte historique dans le bizarre amas d’exhortations morales et mystiques adressées à une jeune veuve par le prédicateur d’Antioche.
  2. Eunape, in Excerpt. legat., p. 21.
  3. Voyez la Chronologie des Lois, par Godefroy ; Codex Theod., t. 1 ; Prolegomen., p. 99-104.