Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/216

Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’une seule famille[1], pourrait offrir un tableau intéressant et instructif des mœurs et du caractère des hommes ; mais une répétition fastidieuse de complaintes vagues et déclamatoires, fatiguerait l’attention du lecteur le plus patient. Les écrivains sacrés et les écrivains profanes de ce siècle malheureux, méritent tous, bien qu’avec quelque différence, le reproche de s’être laissé entraîner aux mouvemens d’une imagination enflammée par l’animosité populaire ou religieuse, en sorte que leur éloquence fausse et exagérée ne laisse à aucun objet sa grandeur ou sa couleur naturelle. Le véhément saint Jérôme peut déplorer, avec raison, les horreurs commises par les Goths et par leurs barbares alliés dans la Pannonie, sa patrie, et dans toute l’étendue des provinces depuis les murs de Constantinople jusqu’au pied des Alpes Juliennes ; les viols, les meurtres, les incendies, et par-dessus tout, la profanation des églises, que les Barbares convertirent en écuries, et leur mépris sacrilège pour les saintes reliques des martyrs. Mais saint Jérôme[2] a sûrement outrepassé les limites de l’histoire et de la raison, lorsqu’il affirme « que dans ces contrées désertes il ne resta rien

  1. Tel est le récit que les ecclésiastiques et les pêcheurs firent du sac de Magdebourg, et que M. Harte a inséré dans l’histoire de Gustave-Adolphe (V, I, p. 313-320) avec quelque crainte de manquer à la dignité de l’histoire.
  2. Et vastatis urbibus, hominibusque interfectis, solitudinem et raritatem bestiarum quoque fieri, et volatilium, pisciumque : testis Illyricum est, testis Thracia, testis in quo