Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/191

Cette page a été validée par deux contributeurs.

protection de l’empire[1]. Ils campaient sous les murs d’Adrianople ; mais les ministres de Valens désiraient leur faire passer l’Hellespont et les éloigner de leurs compatriotes, dans la crainte que la proximité et le succès de la révolte ne les entraînât sous les drapeaux de Fritigern. La soumission respectueuse avec laquelle ils reçurent l’ordre de leur départ pouvait être regardée comme une preuve de leur fidélité ; ils se bornèrent à demander avec modération, et dans les termes les plus convenables, deux jours de délai et les rations nécessaires pour la route. Mais le premier magistrat d’Adrianople, irrité de quelques désordres qu’ils avaient commis dans sa maison de campagne, refusa durement leur demande, et, armant contre eux les citoyens et les manufacturiers de cette ville populeuse, il leur ordonna de partir sur-le-champ, en menaçant de les y forcer. Les Barbares étonnés gardèrent le silence et souffrirent quelque temps les insultes et les hostilités de la populace. Mais dès que leur dédaigneuse patience fut épuisée, ils s’élancèrent sur cette foule indisciplinée, imprimèrent plus d’une honteuse blessure sur le dos de leurs ennemis fuyant de toutes parts, et les dépouillèrent des riches armures[2] qu’ils étaient indignes de porter. La conformité de

  1. Cum populis suis longè antè suscepti. Nous ignorons la date précise et les circonstances de leur émigration.
  2. Il y avait une manufacture impériale de boucliers établie à Adrianople ; les fabricenses ou ouvriers se mirent à la tête de la populace. (Valois, ad. Ammien, XXXI, 6.)