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pette des Barbares[1]. Le faible et coupable Lupicinus, qui, après avoir osé outrager un ennemi redoutable, avait négligé de l’anéantir et avait encore l’audace de le mépriser, marcha contre les Goths à la tête des forces militaires qu’il put rassembler dans cette circonstance pressante. Les Barbares l’attendaient à neuf milles de Marcianopolis ; et dans cette occasion, les talens du général l’emportèrent sur les armes et sur la discipline de ses ennemis. Le génie de Fritigern dirigea si habilement la valeur des Goths, que, par une attaque serrée et impétueuse, ils rompirent les légions romaines. Lupicinus laissa sur le champ de bataille ses armes, ses drapeaux, ses tribuns et ses plus braves soldats ; leur courage inutile ne servit qu’à faciliter la fuite ignominieuse de leur commandant. « Cet heureux jour mit fin aux malheurs des Barbares et à la sécurité des Romains. Dès

  1. Vexillis de more sublatis, auditisque triste sonantibus classicis. (Ammien, XXXI, 5.) Ce sont les rauca cornua de Claudien (in Rufin, II, 67), les longues cornes des uri ou taureaux sauvages, telles que celles dont les cantons suisses d’Uric et d’Underwald se sont servis plus récemment. (Simler, De rep. hel., l. II, p. 201, éd. Fuselin, Tigur. 1734.) On trouve sur un cornet militaire, dans une relation originale de la bataille de Nanci, quelques mots frappans, quoique dits peut-être au hasard (A. D. 1477) : « Attendant le combat, ledit cor fut corné par trois fois, tant que le vent du corneur pouvait durer ; ce qui esbahit fort M. de Bourgogne ; car déjà à Morat l’avait ouy. » (Voyez les pièces justificatives dans la quatrième édition de Philippe de Comines, t. III, p. 493)