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dité était aussi excitée quelquefois par les tapis ornés de franges ou par les toiles précieuses que possédaient leurs nouveaux alliés, ou bien dont le devoir était sacrifié à l’avidité méprisable de remplir leurs maisons d’esclaves ou leurs fermes de troupeaux[1]. Les Goths passèrent dans les bateaux les armes à la main ; et quand ils se trouvèrent tous rassemblés sur le bord opposé du fleuve, leur vaste camp, répandu sur la plaine et sur les hauteurs de la Basse-Mœsie, offrait l’aspect menaçant d’une armée ennemie. Les chefs des Ostrogoths, Saphrax et Alathæus, qui avaient sauvé leur jeune roi, parurent peu de temps après sur la rive septentrionale du Danube, et envoyèrent immédiatement leurs ambassadeurs à Valens pour solliciter, avec les mêmes protestations de reconnaissance et de fidélité, une faveur pareille à celle qui avait été accordée aux supplications des Visigoths ; mais le refus absolu de l’empereur suspendit leur marche, et découvrit le repentir, les craintes et les soupçons de son conseil.

Misère et mécontentements des Visigoths.

Une nation de Barbares, sans asile et sans discipline, exigeait les mesures à la fois les plus fermes et les plus adroites. On ne pouvait suffire à la subsistance journalière d’un million de nouveaux sujets

  1. Eunape et Zosime citent soigneusement ces preuves du luxe et de la richesse des Goths. Cependant on peut présumer que ces objets étaient le fruit de l’industrie des provinces romaines, et étaient passés entre les mains des Goths, soit comme butin en temps de guerre, soit par des présens ou des achats faits durant la paix.