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des Visigoths sur les rives du Niester, résolu de se défendre contre les Barbares victorieux, qu’il ne croyait pas devoir attaquer. La célérité ordinaire des Huns fut retardée par l’embarras des dépouilles et des esclaves ; mais, par leur habileté, ils trompèrent Athanaric, dont l’armée n’échappa qu’avec peine à une entière destruction. Au clair de la lune, un corps nombreux de cavalerie passa la rivière dans un endroit guéable, environna et attaqua le juge des Visigoths, qui défendait les bords du Niester ; et ce ne fut qu’à force de courage et d’intelligence, qu’il parvint à se retirer sur les hauteurs. L’intrépide général avait déjà formé un nouveau et sage plan de guerre défensive ; et les lignes qu’il commençait à construire entre les montagnes, le Pruth et le Danube, auraient mis à l’abri des ravages des Huns la vaste et fertile contrée, connue aujourd’hui sous le nom de Valachie[1] ; mais la timide impatience de ses compatriotes effrayés trompa son espoir et déconcerta ses projets. Persuadés que le Danube était la seule barrière qui pût les mettre à l’abri de la rapide poursuite et de l’invincible valeur des Barbares de Scythie, le corps entier de la nation s’avança vers les bords de cette grande rivière, sous les ordres de Fritigern et

  1. Le texte d’Ammien parait imparfait ou corrompu ; mais on peut tirer de la nature du terrain de quoi expliquer quel devait être le rempart des Goths, et même de quoi suppléer presque à une description. (Mém. de l’Acad., etc., t. XXVIII, p. 444-462.)