Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dont la faible main maîtrisait les forces d’un puissant empire. On établit un pont de bateaux sur le Danube ; la présence de Valens anima les troupes, et l’empereur suppléa à son ignorance de l’art de la guerre par sa valeur personnelle et par une sage déférence aux conseils de Victor et d’Arinthæus, maîtres généraux de la cavalerie et de l’infanterie. Ils conduisirent habilement les opérations de la campagne, mais sans pouvoir chasser les Visigoths des postes avantageux qu’ils occupaient sur les montagnes ; et les Romains, manquant de subsistances dans des plaines dévastées, repassèrent le Danube à l’approche de l’hiver. Les pluies continuelles ayant enflé prodigieusement le cours de ce fleuve, occasionnèrent une suspension d’armes tacite, et retinrent Valens durant tout l’été suivant dans son camp de Marcianopolis. La troisième année de la guerre fut plus avantageuse aux Romains et plus funeste pour les Goths. La cessation du commerce privait les Barbares des objets de luxe que déjà, l’habitude mettait pour eux au nombre des nécessités de la vie ; et le dégât d’une portion considérable du pays les menaçait des horreurs d’une famine. Athanaric se décida ou fut forcé à risquer, dans la plaine, une bataille qu’il perdit ; et la cruelle précaution que prirent les généraux victorieux de promettre une forte gratification pour chaque tête de Goth présentée dans le camp impérial, rendit la défaite et la poursuite plus sanglantes. La soumission des Barbares apaisa Valens et son