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sa terrible menace, il consentit à acheter une paix nécessaire par le sacrifice d’un fugitif coupable. Les gardes placés pour s’assurer de Firmus lui ôtaient tout espoir de s’échapper ; mais le More rebelle, après avoir banni par l’ivresse la crainte de la mort, évita le triomphe insultant des Romains en s’étranglant pendant la nuit. Son cadavre, le seul présent qu’Igmazen pût faire au général, fut jeté négligemment sur un chameau, et Théodose reconduisit ses troupes victorieuses à Sitifi, où le reste de son armée le reçut avec des acclamations de joie et d’affection[1].

Théodose a la tête tranchée à Carthage. A. D. 376.

Les vices de Romanus avaient fait perdre l’Afrique, les vertus de Théodose la rendirent aux Romains ; et la conduite que la cour impériale tint avec ces deux généraux peut servir de leçon en satisfaisant la curiosité. En arrivant en Afrique, Théodose suspendit l’autorité du comte Romanus ; celui-ci fut mis, jusqu’à la fin de la guerre, sous une garde sûre, mais traité avec distinction. On avait les preuves les plus incontestables de ses crimes, et le public attendait avec impatience qu’on le livrât à la sévérité de la justice ; mais la puissante protection de Mellobaudes l’enhardit à récuser ses juges légitimes, à solliciter des délais répétés qui lui donnèrent le temps de se procurer une foule de témoins favorables, et à

  1. Ammien, XXIX, 5. Le texte de ce long chapitre de quinze pages in-quarto, est corrompu et défiguré, et le récit est obscurci, faute de limites géographiques et de renseignemens chronologiques.