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s’attendre que les Allemands, serrés des deux côtés par les armées romaines, seraient bientôt forcés d’évacuer les provinces de la Gaule, et s’empresseraient de marcher au secours de leur pays natal ; mais l’espoir de la campagne fut perdu par l’incapacité, la jalousie, ou par l’effet des instructions secrètes qu’avait reçues Barbatio, qui se comporta comme s’il eût été l’ennemi du César et l’allié secret des Barbares. On peut attribuer à son manque d’intelligence militaire la facilité avec laquelle il laissa passer et repasser une troupe de bandits presque devant les portes de son camp ; mais la perfidie qui lui fit brûler un grand nombre de bateaux et toutes ses provisions superflues, dont l’armée des Gaules avait le plus grand besoin, prouva évidemment ses criminelles intentions. Les Germains méprisèrent un ennemi qui semblait ne pas pouvoir ou ne pas vouloir les attaquer, et la retraite ignominieuse de Barbatio priva Julien d’un secours sur lequel il avait compté. Il se vit abandonné à lui-même dans une position où il ne pouvait rester sans danger, et dont il était difficile de sortir sans honte[1].

Bataille de Strasbourg. A. D. 357. Août.

Les Allemands, délivrés de la crainte d’une invasion, se préparèrent à châtier le jeune Romain qui prétendait leur disputer la possession d’un pays auquel ils avaient droit par des traités précédés de la

  1. Relativement à la jonction projetée et non exécutée de Barbatio avec Julien, et à la retraite de ce général, voyez Ammien, XVI, II ; et Libanius, orat. 10, p. 273.