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tinction furent tués ou blessés ; et l’empereur, qui, dans tous les périls, inspirait et guidait la valeur de ses troupes, fut obligé d’exposer sa personne et de déployer tous ses talens. Le poids des armes offensives et défensives des Romains, qui faisaient leur force et leur sûreté, ne leur permettait pas de poursuivre long-temps l’ennemi après l’action ; et les cavaliers de l’Orient, habitués à lancer au galop et dans toutes les directions possibles[1], leurs javelines et leurs traits, ne se montraient jamais plus formidables qu’au moment d’une fuite rapide et désordonnée. Pour les Romains, d’ailleurs, de toutes les pertes, la plus irréparable était celle du temps. Les braves vétérans, accoutumés au climat froid de la Gaule et de la Germanie, étaient accablés par la chaleur brûlante de l’été d’Assyrie ; des marches et des combats perpétuels épuisaient leur vigueur, et les précautions qu’exigeait une retraite dangereuse devant un ennemi actif, ralentissaient leur marche. Chaque jour, chaque heure augmentait la valeur et le prix des vivres dans le camp[2]. Julien, qui se contentait d’une

  1. Chardin, le plus judicieux des voyageurs modernes, décrit (t. III, p. 57, 58, édit. in-4o.) l’éducation et la dextérité des cavaliers persans. Brisson (De regno persico, p. 650-661, etc.) a recueilli sur ce point les témoignages de l’antiquité.
  2. Lors de la retraite de Marc-Antoine, un chænix de blé se vendait cinquante drachmes ou, en d’autres mots, une livre de farine coûtait douze ou quatorze schellings : le pain d’orge s’échangeait contre son poids en argent. Il