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son secrète avec la ruine de l’Église chrétienne. Julien continuait à maintenir la liberté du culte religieux, sans laisser voir si cette tolérance universelle venait de sa bonté ou de sa justice. Il affectait de plaindre les malheureux chrétiens, qui se méprenaient sur l’objet le plus important de la vie ; mais son mépris faisait tort à sa compassion, et la haine aigrissait son mépris ; il exprimait ses opinions par ces sarcasmes qui causent une blessure profonde et mortelle quand ils sortent de la bouche d’un souverain. Sachant que les chrétiens se glorifiaient du nom de leur rédempteur, il autorisa, et peut-être ordonna le surnom moins honorable de galiléens[1]. Il déclara que la folie des galiléens, qu’il peignait comme des fanatiques dignes du mépris des hommes et de la haine des dieux, avait mis l’empire sur le bord de sa ruine ; et il insinue dans un de ses édits, qu’une salutaire violence est quelquefois nécessaire à la guérison d’un malade frénétique[2]. Julien, dans ses sentimens et dans sa conduite, se conforma à cette

  1. Saint Grégoire de Nazianze, orat. 3, p. 81. Cette loi fut confirmée par l’usage invariable de Julien lui-même. Warburton observe avec justesse (p. 35), que les platoniciens croyaient à la vertu mystérieuse des mots, et que l’aversion de Julien pour le nom de Christ pouvait être un effet de la superstition, aussi-bien que de son mépris.
  2. Fragment de Julien, p. 288. Il tourne en ridicule la μορια Γαλιλαιων (epist. 7), et il perd tellement de vue les principes de la tolérance, que dans la lettre quarante-deux il désire ακοντας ιασθαι.