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Les allégories.

Mais le philosophe dévot, qui adoptait sincèrement et qui encourageait avec chaleur la superstition du peuple, se réservait le privilége d’une libre interprétation ; et, du pied des autels, il se retirait en silence dans le sanctuaire du temple. L’extravagance de la mythologie grecque, disait hautement et clairement au pieux scrutateur de ses mystères, qu’au lieu de se scandaliser ou de se contenter du sens littéral, il devait chercher avec soin cette sagesse cachée que la prudence des anciens avait couverte du masque de la folie et de la fable[1]. Les philosophes de l’école de Platon, Plotin, Porphyre et le divin Jamblique[2], étaient admirés comme les plus habiles maîtres de cette science d’allégories, qui voulait adoucir et accorder les traits difformes du paganisme. Julien lui-même, guidé dans ses recherches mystérieuses par Ædèse, vénérable successeur de Jamblique, aspirait à la possession d’un trésor que, si nous en croyons ses sermens solennels, il estimait

    aveuglement des chrétiens, qui préféraient la croix à ces trophées célestes. Apud. S. Cyrill., l. VI, p. 194.

  1. Voyez les Principes de l’Allégorie, dans les Discours de Julien, VII, p. 216-222. Son raisonnement n’est pas aussi mauvais que celui de quelques théologiens modernes, qui disent : Qu’une doctrine extravagante ou contradictoire doit être divine, parce que personne n’a pu l’inventer.
  2. Eunape a fait une histoire partiale et fanatique de ces sophistes, et le savant Bruker (Hist. philosoph., tom. II, p. 217-303) s’est donné beaucoup de peine pour jeter du jour sur leur vie obscure, et sur leurs systèmes incompréhensibles.