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et généreuse amitié de l’impératrice Eusebia[1], princesse aussi distinguée par son mérite que par sa beauté, et dont l’ascendant sur l’esprit de son mari contrebalançait en quelque sorte la puissante ligue des eunuques. Ce fut par son intercession que l’empereur consentit à voir Julien. Il plaida sa cause avec une noble assurance, et fut écouté favorablement. L’indulgence d’Eusebia prévalut dans le conseil, sur les efforts des eunuques. Ils tâchaient de démontrer qu’il était dangereux de laisser un vengeur du sang de Gallus, et craignant l’effet d’une seconde entrevue, [Julien est envoyé à Athènes. A. D. 355. Mai.]ils engagèrent Julien à se retirer dans les environs de Milan, jusqu’au moment où l’empereur lui assigna la ville d’Athènes pour le lieu honorable de son exil. Il avait montré, dès sa tendre jeunesse, un goût ou plutôt une passion pour la langue, les mœurs, les sciences et la religion des Grecs ; il obéit avec plaisir à un ordre si conforme à ses désirs. Loin du tumulte des armes et de la perfidie des cours, il passa six mois au milieu des bocages de l’académie, et dans la conversation familière des philosophes du siècle, qui travaillèrent à cultiver le génie, à exciter la vanité, et à enflammer la dévotion de leur auguste élève. Leurs soins furent

  1. Elle était née à Thessalonique en Macédoine, d’une famille noble, fille et sœur de consuls. Elle épousa l’empereur dans l’année 352, dans un temps de faction. Les historiens de tous les partis ont rendu justice à son mérite. Voyez les témoignages rassemblés par Tillemont, Hist. des emper., t. IV, p. 750-754.