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impériaux. L’esprit de Constance, incapable de se laisser fixer par la foi ou modérer par la prudence, égaré dans un abîme obscur, se précipitait aveuglément dans l’extrémité opposée à celle qui l’épouvantait. Il embrassait et condamnait successivement les mêmes opinions ; tantôt il exilait, et tantôt il rappelait les chefs des factions arienne et semi-arienne[1]. Durant la saison des affaires et des fêtes publiques, il passait les jours et même les nuits à choisir des mots et à peser des syllabes pour en composer les articles incertains de sa foi, qu’il méditait jusque dans son sommeil ; et l’on recevait ses songes incohérens comme des visions célestes. Constance acceptait avec complaisance le titre pompeux d’évêque des évêques, que lui conféraient des ecclésiastiques qui oubliaient les intérêts de leur ordre pour ceux de leurs passions. Le projet d’établir une uniformité de doctrine, pour laquelle il assembla tant de conciles dans les Gaules, dans l’Italie, dans l’Asie et dans l’Illyrie, fut sans cesse déconcerté par sa propre inconstance, par les dissensions des ariens, et par la résistance des catholiques. Il résolut enfin, par un dernier effort qu’il pensait devoir être dé-

  1. Sozomène, l. IV, c. 23 ; saint Athan., t. I, p. 831. Tillemont (Mém. ecclés., t. VII, p. 947) a tiré des Traités détachés de Lucifer de Cagliari différens exemples du fanatisme impérieux de Constance. Le seul titre de ces Traités respire le zèle et inspire la terreur : Moriendum pro Dei filio ; De regibus apostaticis ; De non conveniendo cum hæretico ; De non parcendo in Deum delinquentibus.