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et de l’Occident ont adopté un prodige qui favorise ou semble favoriser le culte populaire de la croix. La vision de Constantin conserva une place distinguée dans la légende des superstitions, jusqu’au moment où l’esprit éclairé de la critique osa rabaisser le triomphe et apprécier la véracité du premier empereur chrétien[1].

La conversion de Constantin pouvait être sincère.

Les protestans et les philosophes de ce siècle seront disposés à croire qu’au sujet de sa conversion, Constantin soutint une fourberie préméditée par un parjure solennel. Ils n’hésiteront point à prononcer que ses desseins ambitieux le guidèrent seuls dans le choix d’une religion, et que, selon l’expression d’un poète

    neux écrits le triomphe de l’Église et celui de Constantin. Comme ces vénérables personnages n’avaient aucune antipathie pour les miracles, nous pouvons soupçonner qu’aucun d’eux n’eut connaissance de la vie de Constantin par Eusèbe, et ce soupçon est confirmé par l’ignorance de saint Jérôme. Cet ouvrage fut retrouvé par les soins de ceux qui traduisirent ou continuèrent l’histoire ecclésiastique, et qui ont représenté la vision de la croix sous différentes formes.

  1. Godefroy fut le premier qui, dans l’année 1643 (Not. ad Philostorgius, l. I, c. 6, p. 16), osa montrer du doute sur un miracle défendu avec un zèle égal par le cardinal Baronius et par les centuriateurs de Magdebourg. Depuis ce moment plusieurs critiques protestans ont incliné vers le doute et la méfiance. M. Chauffepié a présenté des objections d’une grande force (Diction. critiq., tom. VI, p. 6-11) ; et dans l’année 1774, l’abbé du Voisin, docteur en Sorbonne, a publié une apologie dont on ne peut trop louer l’érudition et la modération.