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Les premiers, qui formaient la classe la plus opulente et la plus distinguée de l’état, s’attachaient au sens littéral de la loi de Moïse, et ils rejetaient pieusement l’immortalité de l’âme comme une opinion qui n’avait point été consignée dans le livre divin, seule règle reconnue de leur foi. À l’autorité des écritures, les pharisiens ajoutaient celle de la tradition ; et sous le nom de tradition, ils comprenaient plusieurs dogmes spéculatifs tirés de la philosophie ou de la religion des Orientaux. Les doctrines de la fatalité ou de la prédestination, des anges et des esprits, et d’un état futur de récompenses et de punitions, étaient au nombre de ces nouveaux articles de leur croyance. Comme les pharisiens, par l’austérité de leurs mœurs, avaient attiré dans leur parti le corps de la nation juive, sous le règne des princes et des pontifes Asmonéens, l’immortalité de l’âme devint l’opinion dominante de la Synagogue. L’humeur des Juifs n’était pas capable de se contenter de cet acquiescement froid et languissant qui aurait pu satisfaire l’esprit d’un polythéiste ; dès qu’ils eurent admis l’idée d’une vie à venir, ils l’embrassèrent avec tout le zèle qui avait toujours caractérisé la nation. Au reste, leur zèle n’ajoutait rien à l’évidence ni à la probabilité de cette doctrine ; et il était

    de supposer qu’elle se contentait de rejeter les traditions des pharisiens. Le docteur Jortin raisonne d’après cette hypothèse, dans ses Remarques sur l’Hist. ecclésiast., vol. II, page 103.