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comme une opinion vaine et extravagante, que rejetait avec mépris tout homme dont l’esprit avait été cultivé par l’éducation.

Parmi les païens de la Grèce et de Rome.

Puisque la philosophie, malgré les efforts les plus sublimes, ne peut parvenir qu’à indiquer faiblement le désir, l’espérance, ou tout au plus la probabilité d’une vie à venir, il n’appartient donc qu’à la révélation divine d’affirmer l’existence, et de représenter l’état de ce pays invisible, destiné à recevoir les âmes des hommes après leur séparation d’avec les corps. Mais il est facile d’apercevoir dans les religions de la Grèce et de Rome plusieurs défauts inhérens, qui les rendaient incapables d’entreprendre une tâche si difficile. 1o. Le système général de la Mythologie ancienne ne portait sur aucune preuve solide, et les plus sages d’entre les païens avaient déjà secoué l’autorité qu’elle avait usurpée. 2o. La description des régions infernales avait été abandonnée aux peintres et aux poètes ; et leur imagination les peuplait d’un si grand nombre de fantômes et de monstres, elle distribuait les punitions et les récompenses avec si peu d’équité, qu’une vérité auguste, la plus faite pour le cœur de l’homme, avait été insensiblement étouffée et dégradée par le mélange absurde des fictions les plus grossières[1].

  1. Le onzième livre de l’Odyssée offre une désolante et incohérente description des régions infernales. Pindare et Virgile ont embelli le tableau ; mais ces poètes mêmes, quoique plus corrects que leur grand modèle, sont tombés