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grand Constantin m’est apparue : il tenait embrassé le corps sanglant de mon frère ; j’ai reconnu sa voix, elle criait vengeance. Mon père m’a défendu de désespérer de la république, et m’a promis que les armes couronneraient la justice de ma cause d’un prompt succès et d’une gloire immortelle. »

L’autorité de cette vision, ou plutôt celle du prince qui la racontait, fit taire les doutes et cesser les négociations. Les conditions ignominieuses de la paix furent rejetées avec mépris ; on renvoya un des ambassadeurs chargé de la dédaigneuse réponse de Constance ; les trois autres furent mis aux fers comme indignes de jouir de leurs priviléges, et les puissances rivales se préparèrent à une guerre implacable[1].

Constance dépose Vétranio. A. D. 350. 25 déc.

Telle fut la conduite, et tel était peut-être le devoir du frère de Constans vis-à-vis du perfide usurpateur des Gaules. Le caractère et la situation de Vétranio admettaient plus de ménagemens ; la politique de l’empereur d’Orient s’occupa de désunir ses ennemis et de priver les rebelles des forces de l’Illyrie. Il réussit aisément à tromper la franchise et la simplicité de Vétranio, qui, flottant quelque temps entre l’honneur et l’intérêt, découvrit au monde l’inconstance de son caractère, et fut insensiblement engagé dans les pièges d’une négociation artificieuse. Constance le reconnut pour son collègue légitime et

  1. Voyez Pierre Patrice, dans les Excerpta legationum, page 27.