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guerre aurait méprisé cette ressource impuissante[1]. Lorsque ces sauvages sortaient de leur désert pour se livrer au pillage, leur barbe touffue, leurs cheveux en désordre, les fourrures dont ils étaient couverts de la tête aux pieds, et le maintien farouche qui annonçait la férocité de leur âme, inspiraient l’horreur et l’épouvante aux habitans civilisés des provinces romaines.

Le tendre Ovide, après une jeunesse passée dans les jouissances du luxe et de la renommée, fut exilé, sans espoir de retour, sur les bords glacés du Danube ; exposé, presque sans défense, à la fureur de ces monstres du désert, et redoutant même que son ombre douce et délicate ne se trouvât un jour confondue avec leurs mânes farouches. Dans ses lamentations pathétiques et quelquefois trop efféminées[2], il décrit de la manière la plus animée

  1. Aspicis et mitti sub adunco toxica ferro,
    Et telum causas mortis habere duas.

        Ovid. ex Ponto, l. IV, epist. 7, v. 7.

    Voyez dans les Recherches sur les Américains, t. II, p. 236-271, une dissertation très-curieuse sur les flèches empoisonnées. On tirait communément le poison du règne végétal ; mais celui qu’employaient les Scythes paraît avoir été tiré de la vipère et mêlé de sang humain. L’usage des armes empoisonnées qui s’est répandu dans les deux mondes, n’a jamais garanti une tribu sauvage des armes d’un ennemi discipliné.

  2. Les neuf livres de lettres en vers qu’Ovide composa durant les sept premières années de son exil, ont un autre mérite que celui de l’élégance et de la poésie. Elles offrent