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de la guerre et de la paix étaient toujours préparés ou conclus par des sacrifices, auxquels le magistrat, le sénateur et le soldat ne pouvaient se dispenser de présider ou de participer[1]. Les spectacles publics formaient une partie essentielle de la dévotion riante des païens. Ils se persuadaient que leurs divinités acceptaient comme l’offrande la plus agréable ces jeux que le prince et le peuple célébraient dans les fêtes instituées en leur honneur[2]. Le fidèle, qui fuyait avec une pieuse horreur les abominations du cirque ou du théâtre, se trouvait dans chaque repas exposé à des embûches infernales, toutes les fois que ses amis, invoquant les dieux propices, versaient des libations[3], et formaient des vœux pour leur

  1. Le sénat romain s’assemblait toujours dans un temple ou dans un lieu consacré (Aulu-Gelle, XIV, 7). Avant de s’occuper d’affaires, chaque sénateur était obligé de verser du vin et de brûler de l’encens sur l’autel. (Suétone, Vie d’Auguste, c. 35.)
  2. Voyez Tertull., De spectaculis, c. 23. Ce réformateur rigide n’a pas plus d’indulgence pour une tragédie d’Euripide que pour un combat de gladiateurs. C’est surtout l’habillement des acteurs qui le choque : « En se servant de brodequins élevés, ces impies s’efforcent d’ajouter une coudée à leur taille. »
  3. On peut voir dans tous les auteurs de l’antiquité, que les anciens avaient coutume de terminer leur repas par des libations. Socrate et Sénèque, dans leurs derniers momens, firent une belle application de cet usage : Postquam stagnum calidæ aquæ introiit, respergens proximos servorum, additâ voce, libare se liquorem illum Jovi liberatori. Tac., Annal., XV, 64.