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avait souvent été permis de faire des miracles. Les chrétiens, qui, par l’intervention des démons, pouvaient expliquer si facilement toutes les apparences surnaturelles, admettaient sans peine et même avec empressement les fictions les plus extravagantes de la mythologie païenne. Mais en ajoutant foi à ces fictions, le chrétien ne les envisageait qu’avec horreur. La plus petite marque de respect pour le culte national eût été à ses yeux un hommage direct rendu aux esprits infernaux, et un acte de rebellion contre la majesté de Dieu.

Horreur des chrétiens pour l’idolâtrie.

Par une suite de cette opinion, le devoir le plus essentiel, mais en même temps le plus difficile d’un chrétien, était de se conserver pur et exempt de toute pratique d’idolâtrie. La religion des anciens peuples ne consistait pas simplement en une doctrine spéculative, professée dans les écoles ou prêchée dans les temples. Les divinités et les rites innombrables du polythéisme étaient étroitement liés à tous les détails de la vie publique ou privée : les plaisirs, les affaires rappelaient à chaque instant ces cérémonies, et il était presque impossible de ne pas les observer, à moins de fuir en même temps tout commerce avec les hommes, et de renoncer aux devoirs et aux amusemens de la société[1]. [Cérémonies.]Les actes les plus solennels

  1. Tertullien a écrit un traité fort sévère contre l’idolâtrie, pour précautionner ses frères contre le danger où ils étaient à chaque instant de commettre ce crime. Recogita sylvam et quantæ latitant spinæ. De idololatriâ, c. 10.