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On ne pouvait guère espérer que des hommes accoutumés dans la pratique du barreau, à regarder le raisonnement comme l’arme de la dispute, et à interpréter les lois au gré de leur intérêt, se dépouillassent de cet esprit dangereux et méprisable en passant à l’administration publique. Il y a eu sans doute dans les temps anciens et modernes des avocats qui ont honoré leur profession en remplissant les postes les plus importans avec autant de sagesse que d’intégrité ; mais dans le déclin de la jurisprudence romaine, la promotion ordinaire des hommes de lois ne pouvait produire que honte et que désordre. La noble et séduisante éloquence avait été long-temps le patrimoine particulier de la noblesse ; mais elle s’était corrompue dans la bouche des affranchis et des plébéiens[1], qui, avec plus d’artifice que d’habileté, en faisaient un trafic sordide et funeste. Quelques-uns d’entre eux cherchaient à pénétrer dans l’intérieur des familles pour y fomenter les discordes. Ils encourageaient les procès, et se préparaient d’amples moissons à eux et à leurs confrères. D’autres, enfermés dans leur demeure, ne soutenaient la dignité de leur état de professeurs des lois qu’en fournissant à de riches cliens des subtilités pour obscurcir la vérité la plus évidente, et des

    rare bonheur, fut l’intime ami de Symmaque et de saint Augustin. Voyez Tillemont, Histoire des empereurs, t. V, p. 1110-1114.

  1. Mamertin, in Panegyr. Vet., XI, 20 ; Astérius, apud Photium, p. 1500.