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serrée dans des limites si étroites ne semble guère mériter l’épithète de vaste qu’Homère et Orphée donnent souvent à l’Hellespont. Mais nos idées de grandeur sont d’une nature relative ; le voyageur, et surtout le poète qui naviguait sur l’Hellespont, oubliait insensiblement la mer. En suivant ses détours et en contemplant le spectacle champêtre qui termine de tous côtés cette riante perspective, son imagination séduite lui peignait ce détroit fameux avec tous les attributs d’une rivière majestueuse, qui coulait rapidement à travers une contrée couverte de bois, et versait enfin ses eaux par une vaste embouchure dans la mer Égée ou Archipel[1]. L’ancienne Troie[2], située sur une éminence au pied du mont

    élève un beau trophée à sa gloire et à celle de son pays. Le dénombrement de l’armée de Xerxès paraît avoir été fait avec assez d’exactitude. Mais la vanité des Perses, et ensuite la vanité des Grecs, furent intéressées à exagérer l’armement et la victoire. Je doute beaucoup que dans une invasion, le nombre des assaillans ait jamais surpassé celui des hommes que renfermait la contrée où ils portaient les armes.

  1. Voyez les Observations de Wood sur Homère, p. 320. J’ai du plaisir à tirer cette remarque d’un auteur qui, en général, semble avoir trompé l’attente du public, comme critique, et encore plus comme voyageur. Il avait parcouru les bords de l’Hellespont ; il avait lu Strabon, et il aurait dû consulter les itinéraires romains. Comment a-t-il pu confondre Ilium et Alexandria Troas (Observat., p. 340, 341), deux villes placées à seize milles de distance l’une de l’autre ?
  2. Démétrius de Scepsis a écrit soixante livres sur trente