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éloigner entièrement la crainte du châtiment, ni favoriser tous les actes de fraude et de violence, sans exposer leur propre autorité et le reste de leurs sujets[1] aux plus grands dangers[2].

Zèle et supplice d’un chrétien.

Cet édit avait à peine été affiché dans le lieu le plus apparent de Nicomédie, qu’un chrétien le mit aussitôt en pièces ; et il marqua en même temps, par les invectives les plus sanglantes, son mépris et son horreur pour des souverains si impies et si tyranniques. Suivant les lois les moins rigoureuses, son offense était un crime de lèse-majesté et méritait la mort ; et s’il est vrai que ce fût un homme de rang et de naissance, ces circonstances ne pouvaient servir qu’à le rendre plus coupable. Il fut brûlé vif, ou plutôt grillé par un feu lent. Ses bourreaux, empressés de venger l’injure personnelle faite aux empereurs, épuisèrent sur son corps tous les raffinemens de la cruauté ; mais ils ne furent pas capables de subjuguer sa patience, ni d’altérer la fermeté inébranlable et le sourire insultant qu’il conserva toujours au milieu des agonies les plus douloureuses. Les chrétiens, quoiqu’ils avouassent que sa conduite n’avait point été strictement conforme aux lois de

  1. Plusieurs siècles après, Édouard Ier employa, avec beaucoup de succès, le même genre de persécution contre le clergé d’Angleterre. Voyez Hume, Hist. d’Angleterre, vol. I, p. 300, la dernière édition in-4o.
  2. C’est ce que rien ne prouve : l’édit de Dioclétien fut exécuté dans toute sa rigueur pendant le reste de son règne. (Eusèbe, Hist. eccl., l. VIII, c. 13) (Note de l’Éditeur.)