Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/209

Cette page a été validée par deux contributeurs.

victime la plus digne de tomber sous ses coups[1]. Cependant l’histoire de la vie de saint Cyprien prouve assez que notre imagination a exagéré la situation périlleuse dans laquelle se trouvait un évêque chrétien[2], et que s’il était exposé à des dangers, l’ambition en court de plus grands dans la poursuite des honneurs temporels. Quatre empereurs romains avec leurs familles, leurs amis et leurs partisans furent massacrés dans l’espace de dix années, pendant lesquelles saint Cyprien guida, par son autorité et par son éloquence, les conseils de l’Église de Carthage. Ce fut la troisième année seulement de son administration qu’il eut lieu de redouter, pendant quelques mois, les édits sévères de Dèce, la vigilance des magistrats et les clameurs de la multitude qui demandait à grands cris que saint Cyprien, ce chef des chrétiens, fût jeté aux lions. [Danger qu’il court. Sa fuite.]La prudence lui conseillait de se mettre à couvert pendant quel-

  1. Les Lettres de saint Cyprien sont une peinture originale et très-curieuse de l’homme et des temps. Voyez aussi les deux Vies de saint Cyprien, composées avec une égale exactitude, quoique avec des vues bien différentes ; l’une par Le Clerc (Biblioth. univ., t. XII, p. 208-378) : l’autre par Tillemont, Mém. ecclésiast., t. IV, part. I, p. 76-459.
  2. Notre imagination n’a point exagéré la situation périlleuse dans laquelle se trouvait un évêque chrétien, puisqu’au dire de Gibbon lui-même « les mines de Numidie renfermaient (en même temps) neuf évêques avec un nombre proportionné d’ecclésiastiques et de fidèles de leurs diocèses » (p. 206, note 3), et il renvoie à saint Cyprien, ep. 76-77. (Note de l’Éditeur.)