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Il aurait paru moins surprenant que le fondateur du christianisme eût été non-seulement révéré par ses disciples, comme un sage et comme un prophète, mais encore adoré comme un dieu. Les polythéistes étaient disposés à recevoir tout article de foi qui semblait se rapprocher de la mythologie du peuple, quelque éloignée ou quelque imparfaite que fût la ressemblance. Les légendes de Bacchus, d’Hercule et d’Esculape, les avaient en quelque façon préparés à voir paraître le fils de Dieu sous une forme humaine[1] ; mais ils s’étonnaient que les chrétiens abandonnassent les temples de ces anciens héros, qui, dans l’enfance du monde, avaient inventé les arts, établi des lois, et vaincu les monstres ou les tyrans de la terre ; et qu’ils eussent choisi pour l’objet

    quelle saint Paul fut transporté au troisième ciel. Dans un autre endroit, Triéphon, qui fait le personnage d’un chrétien, après s’être moqué des dieux du paganisme, propose un serment mystérieux :

    Υψιμεδοντα θεγαν, αμβροτον, ο‌υρανιωνα,
    Υιον ϖατρος, ϖνευμα εκ ϖατρος εκπορευομινον
    Εν εκ τριον, και εξ ενος τρια

    Αριθμεειν με διδασκεις (telle est la réponse profane de Critias) και ορος η αριθμητικη’ ο‌υκ οιδα γαρ τι λεγεις’ εν τρια, τρια εν !

  1. Selon saint Justin martyr (Apolog. major, c. 70-85), le démon, qui avait acquis quelque connaissance imparfaite des prophéties, se serait à dessein revêtu de cette ressemblance, qui pouvait empêcher, quoique par des moyens différens, et le peuple et les philosophes d’embrasser la foi de Jésus-Christ.