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nombre de personnes, le corps du peuple est condamné à l’obscurité, à l’ignorance et à la pauvreté. La religion chrétienne, qui s’adressait à tous les hommes, devait par conséquent tirer beaucoup plus de prosélytes des derniers rangs que des classes supérieures de la société. Cette circonstance simple et naturelle a été représentée sous un jour très-odieux ; et les moyens de défense employés par les apologistes de la foi, ne semblent pas aussi forts que les attaques de leurs adversaires. On a prétendu que la nouvelle secte était presque entièrement composée de la plus vile populace, de paysans et d’ouvriers, de femmes et d’enfans, de mendians et surtout d’esclaves dont elle se servait quelquefois pour s’introduire dans les maisons nobles et opulentes auxquelles ils appartenaient. Ces prédicateurs obscurs (telles étaient les injustes imputations de la malignité), qui paraissent si muets en public, ne sont occupés en particulier qu’à parler et à dogmatiser ; évitant avec précaution la rencontre des philosophes, ils s’attachent à une multitude grossière et ignorante, et ils s’insinuent dans l’esprit de ceux que l’âge, le sexe ou l’éducation ont surtout disposés à recevoir l’impression des terreurs superstitieuses[1].

Quelques exceptions relativement aux connaissances.

Les couleurs sombres et les contours forcés de ce portrait, quoiqu’il ne soit pas tout-à-fait dénué de

  1. Minucius Félix, c. 8, avec les notes de Wower ; Celsus, ap. Origen., l. III, p. 138, 142 ; Julien, ap. Cyril., l. VI, p. 206, édit. Spanheim.