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la sévérité du sénat, on craignit pareillement qu’une très-grande multitude, et pour ainsi dire, un peuple entier n’eût été initié dans ces horribles mystères. Des recherches plus exactes montrèrent bientôt que les coupables n’excédaient pas sept mille ; nombre à la vérité effrayant quand on le considère comme l’objet de la justice publique[1]. C’est avec la même modification que nous devons interpréter les expressions vagues de Tacite, et en premier lieu de Pline, lorsque ces deux auteurs parlent avec exagération de cette foule de fanatiques séduits, qui avaient abandonné le culte des dieux. L’Église de Rome était sans doute la première et la plus nombreuse de l’empire, et nous avons encore un registre très-authentique qui atteste l’état de la religion dans cette ville, vers le milieu du troisième siècle, après une paix de trente-huit ans. À cette époque, le clergé était composé d’un évêque, de quarante-six prêtres, de sept diacres, d’autant de sous-diacres, de quarante-deux acolytes, et de cinquante lecteurs, exorcistes et portiers. Le nombre des veuves, des malades et des pauvres, soutenus par les offrandes publiques, se montait à quinze cents[2]. D’après la raison et

  1. Tite-Live, XXXIX, 13, 15, 16, 17. Rien ne peut surpasser l’horreur et la consternation du sénat, lorsqu’il découvrit les bacchanales, dont la licence effrénée est décrite et peut-être exagérée par Tite-Live.
  2. Eusèbe, l. VI, c. 43. Le traducteur latin, M. de Valois, a jugé à propos de réduire le nombre des prêtres à quarante-quatre.