Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/105

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de condamner la mémoire d’un pape, ou celle d’un saint et d’un martyr, embarrasse aujourd’hui les catholiques, lorsqu’ils sont obligés de rapporter les particularités d’une dispute dans laquelle les défenseurs de la religion se laissèrent entraîner par ces passions qui se montreraient plus convenablement dans les camps ou dans le sénat[1].

Laïques et clergé.

Les progrès de l’autorité ecclésiastique donnèrent naissance à cette distinction remarquable de laïques et de clergé, qui avait été inconnue aux Grecs et aux Romains[2]. Sous le premier de ces noms on comprenait le corps du peuple chrétien ; le second, selon la signification du mot, désignait la portion choisie, qui, séparée de la multitude, se consacrait au service de la religion : classe d’hommes à jamais célèbre, qui a fourni les sujets les plus importans à l’histoire moderne, quoiqu’ils n’en soient pas toujours les plus édifians. Leurs hostilités réciproques troublèrent plus d’une fois la paix de l’Église dans son enfance ; mais leur zèle et leur activité se réunissaient pour la cause commune ; et l’amour du pouvoir, qui, sous les déguisemens les plus trompeurs, se glissait dans le sein des prélats et des martyrs, les animait du désir d’augmenter le nombre de leurs sujets, et

  1. Il s’agissait de savoir si l’on devait rebaptiser les hérétiques. Concernant cette dispute, voyez les Épîtres de saint Cyprien, et le septième livre d’Eusèbe.
  2. Pour l’origine de ces mots, voyez Mosheim, p. 141 ; Spanheim, Hist. ecclésiastique, p. 633. La distinction de clerus et laïcus était établie avant le temps de Tertullien.