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que possédait une portion égale et indivisible[1]. Les princes et les magistrats, répétait-on souvent, pouvaient s’enorgueillir de leurs droits à une domination terrestre et passagère ; l’autorité épiscopale est seule dérivée de Dieu ; elle s’étend sur ce monde et sur l’autre. Les évêques sont les vice-gérens de Jésus-Christ, les successeurs des apôtres, et les substituts mystiques du grand-prêtre de la loi mosaïque. Leur privilége exclusif de conférer les ordres sacerdotaux, ôta la liberté des élections au clergé et au peuple, à qui elles appartenaient ; et si, dans l’administration de l’Église, ils suivaient quelquefois l’avis des prêtres ou le désir des fidèles, ils avaient le plus grand soin de se faire un mérite de cette condescendance volontaire. Les évêques reconnaissaient l’autorité suprême qui résidait dans l’assemblée de leurs frères ; mais chacun d’eux, dans le gouvernement de son diocèse particulier, exigeait de son troupeau une obéissance aussi implicite que si cette métaphore tant employée avait été littéralement juste, et que le berger eût été d’une espèce supérieure à celle de ses brebis[2] ! Une pareille autorité cependant ne

  1. Saint Cyprien, dans son fameux traité De unitate Ecclesiæ, p. 75-86.
  2. Nous pouvons en appeler à toute la conduite de saint Cyprien, à sa doctrine, à ses épîtres. Le Clerc, dans une vie abrégée de ce prélat (Bibliothéque universelle, tom. XII, p. 207-378), le montre à découvert avec beaucoup de liberté et d’exactitude.