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primer les pensées par des figures, un peuple ne conservera jamais de monumens historiques. Incapable de percer dans les sciences abstraites, jamais il ne pourra cultiver avec succès les arts utiles et agréables de la vie.

Des arts, de l’agriculture.

Ces arts furent entièrement inconnus aux habitans au Nord. Les Germains passaient leurs jours dans un état de pauvreté et d’ignorance que de vains déclamateurs se sont plus à décorer du nom de vertueuse simplicité. On compte maintenant en Allemagne environ deux mille trois cents villes[1] entourées de murs. Dans une étendue de pays beaucoup plus considérable, Ptolémée n’a pu découvrir que quatre-vingt-dix bourgs ou villages, qu’il décore du nom pompeux de villes[2]. Selon toutes les apparences, les forêts de la Germanie ne renfermaient que des fortifications grossières, élevées sans art, pour mettre les femmes, les enfans et les troupeaux à l’abri d’une invasion subite, tandis que les guerriers marchaient à la rencontre de l’ennemi[3]. Tacite rapporte, comme un fait constant, que, de son temps, ces Barbares n’avaient aucune ville[4].

  1. Recherches philosophiques sur les Américains, t. III, p. 228. Cet ouvrage curieux est, dit-on, d’un Allemand.
  2. Le géographe d’Alexandrie est souvent critiqué par l’exact Cluvier.
  3. Voyez César et le savant M. Whitaker, dans son Histoire de Manchester, tom. I.
  4. Tacite, Germ., 15.