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tendaient jusqu’aux fruits innocens de cette union irrégulière[1]. Mais toutes les fois que l’offense inspire moins d’horreur que la punition, la rigueur de la loi pénale est forcée de céder aux mouvemens naturels imprimés dans le cœur de l’homme. Les articles les plus odieux de cet édit furent adoucis ou annullés sous le règne suivant[2]. Constantin lui-même tempera souvent, par des actes particuliers de clémence, l’esprit cruel de ses institutions générales ; et telle était l’humeur singulière de ce prince, qu’il se montrait aussi indulgent, aussi négligent même dans l’exécution de ses lois, qu’il avait paru sévère et même cruel en les publiant. Il serait difficile de découvrir un symptôme plus marqué de faiblesse, soit dans le caractère du prince, soit dans la constitution du gouvernement[3].

Guerre contre les Goths. A. D. 322.

L’administration civile fut quelquefois interrompue par des expéditions militaires entreprises pour la défense de l’empire. Crispus, jeune prince du caractère

  1. Voyez l’édit de Constantin adressé au peuple de Rome, dans le Code Théodosien, l. IX, titre 24, t. III, p. 189.
  2. Son fils assigne de bonne foi la véritable raison qui a fait modifier cette loi : Ne sub specie atrocioris judicii aliqua in ulciscendo crimine dilatio nasceretur. Code Théod., t. III, p. 193.
  3. Eusèbe (Vie de Constantin, l. III, c. 1) ne craint pas d’assurer que, sous le règne de son héros, l’épée de la justice resta oisive entre les mains des magistrats. Eusèbe lui-même (l. IV, c. 29, 54) et le Code Théodosien nous apprennent que l’on ne fut redevable de cette douceur excessive, ni au manque de crimes atroces ni au défaut de lois pénales.