Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/448

Cette page a été validée par deux contributeurs.

guerriers pouvaient être utiles sans devenir encore dangereux[1]. En supprimant les troupes qui avaient leur poste à Rome, Constantin porta le coup fatal à la dignité du sénat et du peuple ; la capitale désarmée resta exposée, sans protection, à la négligence et aux insultes d’un maître éloigné. Nous pouvons observer que, dans ce dernier effort des Romains pour conserver leur liberté expirante, l’appréhension d’un tribut les avait d’abord engagés à placer Maxence sur le trône. Ce prince ayant exigé du sénat ce tribut sous le nom de don gratuit, ils implorèrent alors l’assistance du souverain des Gaules. Constantin vainquit le tyran, et convertit le don gratuit en taxe perpétuelle. Les sénateurs, suivant leurs facultés, dont ils furent forcés de donner une déclaration, furent partagés en différentes classes : les plus opulens payaient annuellement huit livres d’or ; on en exigea quatre de la seconde classe, et deux de la dernière ; ceux qui, par leur pauvreté, méritaient une exemption, furent cependant taxés à sept pièces d’or. Outre les membres de cette assemblée, leurs fils, leurs descendans, leurs parens même, jouissaient des vains priviléges attachés à la dignité de sénateurs, et ils en supportaient les charges onéreuses. On ne s’étonnera plus que Constantin

  1. « Prætoriæ legiones ac subsidia factionibus aptiora quàm urbi Romæ, sublata penitus ; simul arma atque usus indumenti militaris. » (Aurelius-Victor.) Zosime (l. II, p. 89) parle de ce fait en historien ; et il est très-pompeusement célébré dans le neuvième panégyrique.