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tèrent la nécessité de prévenir sa ruine en développant avec vigueur les forces qui lui restaient. Les ressources de Maxence en hommes et en argent étaient encore considérables. Les prétoriens sentaient combien leur intérêt et leur sûreté se trouvaient fortement liés à la cause de leur maître. On assembla bientôt une nouvelle armée, plus nombreuse que celles qui avaient été ensevelies dans les champs de Turin et de Vérone. L’empereur était loin de songer à prendre le commandement de ses troupes. Totalement étranger aux travaux de la guerre, il tremblait de la seule idée d’une lutte si dangereuse ; et, comme la crainte est ordinairement superstitieuse, il écoutait avec une sombre inquiétude le rapport des augures, et des présages qui semblaient menacer sa vie et son empire. Enfin, la honte lui tint lieu de courage, et le força de paraître sur le champ de bataille. Ce lâche tyran ne put supporter le mépris du peuple romain : partout le cirque retentissait des clameurs de l’indignation ; la multitude assiégeait tumultueusement les portes du palais, accusant la lâcheté d’un prince indolent, et célébrant le courage héroïque de son rival[1]. Maxence, avant de quitter Rome, consulta les livres sibyllins. Si les gardiens de ces anciens oracles ignoraient les secrets du destin, du moins étaient-ils versés dans la science du monde : ils rendirent une réponse très--

  1. Voy. Panegyr. vet., XI, 16 ; Lactance, De morte pers., c. 44.