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était pesante, l’Euphrate très-profond, car il avait en cet endroit au moins quatre cents toises de large[1] : cependant la force et l’adresse du prince le servirent si heureusement, qu’il arriva en sûreté sur la rive opposée[2]. Pour le général romain, nous ignorons comment il se sauva. [Réception que lui fait Dioclétien.]Lorsqu’il retourna dans la ville d’Antioche, Dioclétien le reçut non avec la tendresse d’un ami et d’un collègue, mais avec l’indignation d’un souverain irrité. Vêtu de la pourpre impériale, humilié par le souvenir de sa faute et de son malheur, le plus orgueilleux des hommes fut obligé de suivre à pied le char de l’empereur l’espace d’un mille environ, et d’étaler devant toute la cour le spectacle de sa disgrâce[3].

Seconde campagne de Galère. A. D. 297.

Dès que Dioclétien eut satisfait son ressentiment particulier, et qu’il eut soutenu la majesté de la puissance impériale, ce prince, cédant aux instances du César, lui permit de réparer son honneur et celui des armes romaines. Aux troupes efféminées de l’Asie,

  1. Voyez la dissertation de Forster, dans le second volume de la traduction de la Retraite des dix mille, par Spelman, que je crois pouvoir recommander comme une des meilleures versions qui existent.
  2. Hist. d’Arménie, l. II, c. 76. Au lieu de rapporter cet exploit de Tiridate à une défaite imaginaire, je l’ai transféré à la défaite réelle de Galère.
  3. Ammien-Marcellin, l. XIV. Entre les mains d’Eutrope (IX, 24), de Festus (c. 25), et d’Orose (VII, 25), le mille s’augmente aisément jusqu’au nombre de plusieurs milles.