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Nord ; il attira du continent un grand nombre d’excellens artistes. Plusieurs médailles qui nous sont parvenues, attestent encore son goût et son opulence. Né sur les confins de la patrie des Francs, il rechercha l’amitié de ce peuple formidable, en imitant leur habillement et leurs manières : il enrôla les plus braves de leur jeunesse dans ses troupes de terre et de mer ; et, pour reconnaître les services que lui procurait une alliance si utile, il leur enseigna la science dangereuse de l’art militaire et de la navigation. Carausius resta toujours en possession de Boulogne et de son territoire. Ses flottes triomphantes couvraient le détroit, commandaient les bouches du Rhin et de la Seine, ravageaient les côtes de l’Océan, et répandaient la terreur de son nom au-delà des colonnes Hercule. Sous son administration, la Bretagne, destinée à posséder l’empire des mers, avait déjà pris son rang naturel de puissance maritime, qui devait un jour la rendre si respectable[1].

Reconnu par les empereurs. A. D. 289.

En s’emparant de la flotte de Boulogne, Carausius avait enlevé à l’empereur les moyens de le poursuivre et de se venger. Lorsque après un temps considé-

  1. Comme il nous est parvenu un grand nombre de médailles frappées par Carausius, cet usurpateur est devenu l’objet favori de la curiosité des antiquaires ; les moindres particularités de sa vie et de ses actions ont été recherchées avec le soin le plus exact. Le docteur Stukely, en particulier, a consacré un volume considérable à l’histoire de l’empereur breton. J’ai fait usage de ses matériaux, et j’ai rejeté la plupart de ses conjectures imaginaires.