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son père, après avoir obtenu la liberté, exerça le métier de scribe, emploi réservé communément aux personnes de son état[1]. Des oracles favorables ou plutôt l’impulsion d’un mérite supérieur, éveillèrent l’ambition du fils, l’engagèrent à suivre la profession des armes, et lui annoncèrent une fortune brillante. Le hasard et son propre génie contribuèrent à son élévation. Ce serait un spectacle très-curieux que d’observer l’enchaînement des circonstances qui lui fournirent les moyens de remplir ses hautes destinées, et de développer aux yeux de l’univers les talens qu’il avait reçus de la nature. Dioclétien obtint successivement le gouvernement de la Mœsie, les honneurs du consulat, et le commandement important des gardes du palais. Il se distingua par son habileté dans la guerre de Perse. Enfin, après la mort de Numérien, au jugement et de l’aveu de ses rivaux, l’esclave fut déclaré le plus digne du trône impérial. La malignité du zèle religieux, qui n’a pas épargné la férocité sauvage de Maximien son collègue, s’est efforcée de jeter des soupçons sur le courage personnel de l’empereur Dioclétien[2]. Nous croirons difficilement à la lâcheté d’un soldat de fortune, qui mérita et qui sut

  1. Voyez Dacier, sur la VIe satire du IIe livre d’Horace ; Corn.-Nepos, Vie d’Eumène, c. 1.
  2. Lactance (ou l’auteur, quel qu’il soit, du petit traité De mortibus persecutorum) accuse en deux endroits Dioclétien de timidité. Dans le chapitre 9, il dit de lui : Erat in omni tumultu meticulosus et animi disjectus.