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taine, qu’il était monté sur le trône vacant[1]. Une conduite si différente de celle de son vertueux prédécesseur, ne prévenait pas en faveur du nouveau règne. Les Romains, sans pouvoir et sans liberté, eurent recours à des murmures[2], seul privilége dont on ne leur eut pas ôté la jouissance. La flatterie éleva cependant la voix. Il existe encore une églogue composée à l’avènement de Carus. Quelque méprisable que soit le sujet de cette pièce, on peut la lire avec plaisir. « Deux bergers, pour éviter la chaleur du midi, se retirent dans la grotte de Faune. Ils aperçoivent quelques caractères récemment tracés sur un hêtre. La divinité champêtre avait décrit en vers prophétiques la félicité promise à l’empire sous le règne d’un si grand prince. Faune salue le héros qui, prêtant ses épaules pour soutenir le poids de l’univers chancelant, doit étouffer les guerres, les factions, et rétablir l’innocence et la sécurité de l’âge d’or[3]. »

Carus défait les Sarmates et marche en Orient.

Selon toutes les apparences, ces élégantes bagatelles ne parvinrent jamais aux oreilles d’un vieux général, qui, avec le consentement de ses légions, se préparait à exécuter le projet si long-temps suspendu de la guerre contre les Perses. Avant son dé-

  1. Hist. Aug., p. 249. Carus félicite le sénat de ce qu’un de ses membres est fait empereur.
  2. Hist. Aug., p. 242.
  3. Voy. la première églogue de Calphurnius, dont M. de Fontenelle préfère le plan à celui du Pollion de Virgile. Voy. tom. III, p. 148.