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été satisfaite. Elles déplorèrent alors leur funeste précipitation, oublièrent la sévérité du prince qu’elles venaient de massacrer, et se hâtèrent d’élever un monument honorable à sa mémoire, pour perpétuer le souvenir de ses vertus et de ses victoires[1].

Élévation et caractère de Carus.

Après les premiers mouvemens de la douleur et du repentir, les légions proclamèrent, d’un consentement unanime, Carus préfet du prétoire. Tout ce qui tient à ce prince paraît douteux et incertain. Il se glorifiait du titre de citoyen romain, et il affectait de comparer la pureté de son sang avec l’origine étrangère et même barbare de ses prédécesseurs. Cependant, loin d’admettre ses prétentions, ceux de ses contemporains qui ont fait le plus de recherches sur sa naissance ou sur celle de ses parens, la placent en Illyrie, dans la Gaule ou en Afrique[2]. Quoique soldat, son éducation avait été très-cultivée ; quoique sénateur, il se trouvait revêtu de la première dignité de l’armée ; et dans un siècle où les professions civiles et militaires commençaient à être pour jamais séparées l’une de l’autre, elles

  1. Prohus, et vere probus situs est : Victor omnium gentium barbararum : Victor etiam tyrannorum.
  2. Tout ceci cependant peut être concilié. Il était né à Narbonne en Illyrie, qu’Eutrope a confondue avec la ville plus fameuse de ce nom, située dans la Gaule. Son père pouvait être Africain, et sa mère une noble romaine. Carus lui-même fut élevé dans la capitale. Voyez Scaliger, Animad. ad Euseb. Chron., p. 241.