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était presque impossible de contenir dans l’obéissance toutes les parties de ses vastes domaines. Les Barbares, pour briser leurs chaînes, avaient profité de l’occasion favorable d’une guerre civile. L’empereur, avant de marcher au secours de la Gaule, avait donné le commandement de l’Orient à Saturnin. Ce général, homme de mérite et d’une grande expérience, leva l’étendard de la révolte. L’absence de son souverain, la légèreté du peuple d’Alexandrie, les sollicitations pressantes de ses amis, et ses propres alarmes l’avaient entraîné dans cette démarche téméraire. Mais du moment qu’il fut revêtu de la pourpre, il perdit à jamais l’espoir de conserver l’empire et même la vie. « Hélas ! dit-il, la république vient de perdre un citoyen utile. La précipitation d’un instant a détruit plusieurs années de service. Vous ne savez pas, continuait-il, quels sont les maux attachés à la puissance suprême. L’épée est sans cesse suspendue sur notre tête, nous redoutons nos propres gardes, nous n’osons nous fier à ceux qui nous entourent. Il ne nous est plus permis d’agir, ni de nous reposer à notre volonté. Ni l’âge, ni le caractère, ni la conduite, ne sauraient nous garantir des traits empoisonnés de l’envie. En m’élevant sur le trône, vous m’avez condamné à une vie de fatigues et à une mort prématurée. La seule consolation qui me reste, est l’assurance que je ne périrai pas seul[1]. » La première partie de la prédiction

  1. Vopiscus, Hist. Aug., p. 245, 246. Cet orateur infor-