Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/278

Cette page a été validée par deux contributeurs.

entreprenant, résolut de profiter de ses victoires. Intimement persuadé que les Barbares ne consentiraient jamais à la paix tant que leur pays ne souffrirait pas des calamités de la guerre, il passa le Rhin, et fit briller ses aigles invincibles sur les rives de l’Elbe et du Necker. Sa présence étonna la Germanie épuisée par les mauvais succès de la dernière migration. Neuf des princes les plus considérables du pays se rendirent à son camp, et se prosternèrent à ses pieds ; ils reçurent humblement les conditions qu’il lui plut de dicter. Le vainqueur exigeait qu’on lui remît exactement les dépouilles et les prisonniers enlevés aux provinces. Il obligea leurs propres magistrats à sévir contre ceux qui retiendraient quelque partie du butin. Un tribut considérable, consistant en blé, en troupeaux et en chevaux, les seules richesses des Barbares, fut destiné à l’entretien des garnisons établies sur les limites de leur territoire. Probus avait même conçu le dessein de forcer les Germains à quitter l’usage des armes. Il voulait les engager à confier leurs différends à la justice de Rome, et leur sûreté à sa puissance. Ce plan magnifique aurait exigé la résidence constante d’un gouverneur impérial, soutenu d’une armée nombreuse : aussi Probus jugea-t-il à propos de différer l’exécution d’un si grand projet, dont l’avantage était facilement plus spécieux que solide[1]. Que la Germanie eût été réduite en province avec des frais et des peines im-

  1. Hist. Aug., p. 238, 239. Vopiscus cite une lettre de