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Observations sur cet événement.

Si l’on voulait approfondir un événement si extraordinaire, on verrait combien, de la manière dont il est présenté, les circonstances en sont incompatibles l’une avec l’autre, et dénuées de vraisemblance. L’altération de la monnaie s’accorde très-bien, à la vérité, avec l’administration de Gallien ; et, selon toutes les apparences, ceux qui avaient été employés à cette pratique odieuse redoutèrent la justice sévère d’Aurélien. Mais le crime, aussi-bien que le profit, ne devait concerner qu’un petit nombre de personnes ; et il est difficile de concevoir comment de pareils coupables ont pu armer un peuple qu’ils trompaient si indignement, contre un prince qu’ils trahissaient. On croirait plutôt qu’ils auraient partagé la haine publique avec les délateurs et les autres ministres de l’oppression. Il semble que la réformation des espèces ne devait pas être moins agréable au peuple que la destruction de plusieurs anciens comptes brûlés par ordre de l’empereur dans la place de Trajan[1]. Dans un siècle où les principes du commerce étaient à peine connus, on ne parvenait peut-être au but le plus désirable qu’en usant de rigueur, et en employant des voies peu judicieuses. Mais de pareils moyens, dont l’impression ne saurait subsister long-temps, ne sont pas capables d’exciter ni d’entretenir le feu d’une guerre dangereuse. Quelquefois le redoublement d’impôts onéreux établis sur les terres et sur les nécessités de la

  1. Hist. Aug., p. 222 ; Aurel.-Victor.